Van Schoute Roger
Sommaire
Mots clés
- Primitifs flamands
- Méthodes scientifiques
- Cadres et supports
Éléments biographiques
1956 | Licence en histoire (Université catholique de Louvain) |
1957 | Licence en histoire (Université catholique de Louvain) |
1961 | Doctorat (Université catholique de Louvain) |
1962 | Chargé de cours à l’Université catholique de Louvain |
1965 | Professeur |
1966 | Cofondateur de l’Association des Diplômés en Archéologie et Histoire de l’art de Louvain |
1967 | Professeur ordinaire |
1975 | Fondateur des Colloques pour l’étude du dessin sous-jacent |
2004 | Cofondateur de l’asbl Association des Archéologues, Historiens d'art et Musicologues de l'UCLouvain |
Présentation analytique
Après des études secondaires au collège Saint-Julien à Ath, Roger Van Schoute entame des études en histoire à l’Université catholique de Louvain (mémoire intitulé: Le patriciat nivellois à la fin du Moyen Âge. Premiers jalons, 1956), au cours desquelles il rencontre sa future femme, Monique Verboomen, avec laquelle il collabora toute sa vie. Dans un train, il échangea avec le chanoine Raymond Lemaire (1878-1954) qui l’invita à suivre quelques cours en histoire de l’art. Cela le mènera à entamer en parallèle des études dans cette matière (mémoire intitulé : Jérôme Bosch: problèmes de méthode, 1957). En 1961, il défendit sa thèse de doctorat : Tableaux flamands du XVe siècle de la collection d’Isabelle la Catholique conservés à la Capilla Real de Grenade : Historique de la collection et étude des œuvres envisagée particulièrement sous l’angle de l’exécution picturale, rédigée sous la direction de Jacques Lavalleye (1900-1974). Il fut notamment très actif en ce qui concerne l’enseignement de la didactique aux étudiants en histoire de l’art et archéologie, avant la nomination d’un professeur dédié à cette matière. Il fut également professeur à l’Institut Supérieur d’histoire de l’art et d’archéologie à Bruxelles (1968-2008).
R. Van Schoute a fondé dans les années 1960, avec peu de moyens, le Laboratoire d’étude des œuvres d’art par les méthodes scientifiques afin de soutenir la formation des étudiants en histoire de l’art après la création, lors de l’année académique 1958-59, d’un cours consacré à la technologie de la peinture en relation avec les méthodes de laboratoire. Situé d’abord à Leuven (rez-de-chaussée, Vlamingenstraat, no. 83), ce laboratoire fut déménagé au début des années 1970 à Louvain-la-Neuve (53, rue Cardinal Mercier), dans des locaux spécialement conçus pour lui (Département 1997, p. 14). Après son accès à l’éméritat, R. Van Schoute continua à être actif dans le Laboratoire qu’il a créé, ainsi que dans la recherche et dans l’organisation de colloques. Il fut également, en 1966, l’un des fondateurs de l’Association des Diplômés en Archéologie et Histoire de l’art de Louvain, qui dès 1968 publia la Revue des Archéologues et Historiens d’art de Louvain. En 2004, suite à la dissolution de cette association, il fut également un des fondateurs de l’asbl Association des Archéologues, Historiens d’art et Musicologues de l’UCLouvain qui continua à publier la revue sous le titre de Revue des Archéologues, Historiens d’art et Musicologues de l’UCL. Il est d’ailleurs resté administrateur de l’association jusqu’à son décès.
Dans la lignée de son promoteur de thèse Jacques Lavalleye, R. Van Schoute s’est spécialisé dans l’étude des Primitifs flamands. Il s’intéressa plus particulièrement aux études techniques qui se développaient à cette époque. Les méthodes de laboratoire furent d’abord essentiellement employées dans l’étude des peintures aux USA (surtout à l’Université de Harvard) à partir des années 1920, mais aussi en Belgique, dans le sillage de Paul Coremans (1908-1965), premier directeur de l’Institut royal du Patrimoine artistique (IRPA/KIK) (Faries 2001). En effet, c’est sous l’impulsion de ce chercheur que l’emploi de documents techniques fut institutionalisé en Belgique en tant que documentation standard des œuvres d’art et en particulier des peintures. Cet intérêt nouveau dans les années 1950 pour les méthodes de laboratoire en Belgique a influencé R. Van Schoute alors qu’il rédigeait sa thèse de doctorat avec notamment l’appui du Centre National de Recherches « Primitifs flamands » (aujourd’hui Centre for the Study of Flemish Primitives, basé à l’IRPA/KIK) à Bruxelles, thèse défendue en 1961 et consacrée aux œuvres des Primitifs flamands conservées à la Capilla Real de Grenade. Cette thèse sera par la suite adaptée et publiée dans la série Les Primitifs Flamands. 1. Corpus de la peinture des anciens Pays-Bas méridionaux au quinzième siècle (Van Schoute 1963).
Ensuite, les recherches de R. Van Schoute restèrent en grande partie consacrées à l’art des Primitifs flamands. Sa bibliographie comprend des études sur Jheronimus Bosch, Hugo van der Goes, Rogier van der Weyden, Jan van Eyck, Petrus Christus, ou encore Hans Memling. À la fin des années 1960 et au début des années 1970, il étudia diverses œuvres de Dirk et Aelbrecht Bouts. Cette étude culminera avec l’exposition Dirk Bouts en zijn tijd qui se tint du 12 septembre au 3 novembre 1975 dans l’église Saint-Pierre de Louvain. Le catalogue de cette exposition fait la part belle à ces études techniques (Van Schoute et van Asperen de Boer 1975b). Afin d’élargir son étude sur ces deux peintres, il réalisa les documents techniques des œuvres présentées lors de cette exposition en travaillant sur place durant la nuit, comme il aimait à le rappeler (ces études furent publiées l’année suivante : Van Schoute, Hollanders-Favart, Verougstraete-Marcq et al. 1975a; 1975b; 1975c; 1975d). D’autres expositions auxquelles il participa présentèrent des études techniques, certaines à une époque où peu de ces documents étaient présentés au grand public : Jheronimus Bosch (‘S Hertogenbosch, 1967), Jheronimus Bosch: Tentagões de Santo Antão (Lisbonne, 1972), Het Laatgotische beeldsnijcentrum Leuven (Louvain, 1979), Kijk op Kunst. Schilderijen onderzocht met natuurwetenschappelijke methoden (Hasselt, 1979), Arts, Sciences et Techniques (Louvain-la-Neuve, 1980), Hugo van der Goes (1430/40-1482). L’homme et son œuvre (Bruxelles, 1982), Schatten der armen. Het artistiek bezit van het OCMW-Leuven (Leuven, 1988-89), Le Delizie dell’Inferno dipinti di Jheronimus Bosch e altri Fiamminghi restaurati (Venise, 1992), The Triumph of Death by Pieter Brueghel the Younger (Anvers, 1993), Dirk Bouts (ca. 1410-1475), een Vlaams primitief te Leuven (Leuven, 1998), El jardin de las delicias de El Bosco: copias, estudio technico y restauracion (Madrid, 2000), Fake/Not Fake. Restaurateurs ou faussaires des primitifs flamands (Bruges, 2004).
C’est autour de ces nombreux sujets de recherche que le Laboratoire d’étude des œuvres d’art s’est développé. Celui-ci fut équipé d’une caméra de réflectographie à l’infrarouge et du matériel de radiographie. Grâce à un membre de sa famille, le professeur Gerhard Sokal (1927-2009), titulaire de la chaire d’hématologie à l’UCL et qui fut doyen de la faculté de médecine (1979-84), il se tint au courant du développement des méthodes radiographiques, ce qui lui permit de faire quelques essais de ces nouvelles techniques sur les œuvres d’art, mais aussi à mener une réflexion sur la conservation des radiographies (Van Schoute 1970a; 1972; Van Schoute & Hollanders-Favart 1978; 1981).
Les recherches de R. Van Schoute furent également marquées par de nombreuses collaborations nationales et internationales. C’est à l’IRPA qu’il rencontra, dans les années 1960, J.R.J. van Asperen de Boer qui améliora grandement le matériel destiné à l’étude du dessin sous-jacent. Ce chercheur néerlandais mit en effet au point la réflectographie à l’infrarouge (annonce de la découverte en 1966 et présentation de son doctorat qui y est consacré à l’Université d’Amsterdam en 1970) (Faries 2001, p. 74-76) qui permit d’améliorer grandement la qualité de la documentation par rapport à la photographie à l’infrarouge. Cette nouvelle méthode permettait en effet de voir plus de détails du dessin sous-jacent et, chose non négligeable, d’avoir un accès immédiat aux résultats grâce à un moniteur alors que, pour la photographie infrarouge, il fallait attendre le développement du film photographique spécial employé. Une des caméras inventées par van Asperen de Boer rejoignit d’ailleurs assez tôt le Laboratoire d’études des œuvres d’art. Cette collaboration mena à la publication d’un certain nombre d’études fondamentales pour la discipline, en particulier une étude sur le dessin sous-jacent des œuvres attribuées au Maître de Flémalle et à Rogier Van der Weyden qui commença autour de 1975 (Van Schoute et van Asperen de Boer 1975a ; des rapports intermédiaires furent publiés en 1982 et 1985 : Van Schoute, van Asperen de Boer, Engelsman et Filedt 1982; Van Schoute, van Asperen de Boer, Dalderup et al. 1985 ; de jeunes chercheurs, dont Jellie Dijkstra, C.M.A. Dalderup et Jan Piet Filedt Kok, participèrent également au projet) et sera publiée en 1992 (Van Schoute, van Asperen de Boer & Dijkstra 1992). Une grande polémique avait en effet lieu parmi les chercheurs, certains étant partisans de l’identification des deux peintres avec un seul artiste et d’autres qui y voyaient la main de deux artistes différents. C’est cette étude qui permit de façon décisive d’indiquer qu’il s’agissait en fait de deux peintres. Mais ce ne fut pas son seul intérêt puisqu’elle permit d’aborder de façon nouvelle le rôle des ateliers dans la production de peintures (existence de modèles d’atelier, division des mains intervenues sur les peintures,…) ainsi que sur le statut de l’original et de la copie (Faries 2001, p. 95-97; Faries 2003, p. 30).
Dans le cadre de ses recherches, les autres collaborations de R. Van Schoute furent nombreuses. Au sein du laboratoire d’étude des œuvres d’art, il intégra petit à petit à ses recherches Hélène Verougstraete, dont il fut le directeur de thèse, pour finir par travailler main dans la main avec elle. Ils s’intéressèrent notamment de façon approfondie aux cadres et supports des œuvres des Primitifs flamands (par exemple : Van Schoute & Verougstraete-Marcq 1989b), à l’œuvre de Pieter Bruegel l’Ancien (tous deux redécouvrirent notamment un Pieter Bruegel l’Ancien signé, voir : Van Schoute & Verougstraete 2000a) ou encore aux faux en peinture (Van Schoute & Verougstraete 2001b; Van Schoute, Verougstraete & Borchert 2004). D’autres collaborations internationales furent récurrentes dans sa carrière, notamment avec Carmen Garrido, du laboratoire du Musée du Prado à Madrid, avec laquelle il étudia notamment de nombreuses œuvres de Jheronimus Bosch d’un point de vue technique. Ces études techniques réalisées depuis les années 1980 aboutirent à la publication d’un ouvrage scientifique (Van Schoute & Garrido 2001). L’étude de l’œuvre de Bosch fut d’ailleurs un thème récurrent dans sa production scientifique tout au long de sa carrière. En parallèle à ces recherches académiques, il travailla également avec sa femme, Monique Verboomen, sur leur passion commune : les faïences fines belges qu’ils collectionnaient (Van Schoute & Verboomen 2006). Ils firent d’ailleurs la dation de cette collection aux Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles.
Son implication dans la recherche sur l’étude technique des peintures l’a amené à mettre sur pied en 1975 un premier colloque consacré à l’étude du dessin sous-jacent dans la peinture, qui se pérennisera et s’étendra à la technologie dans la peinture au cours des années. Là également la collaboration a été le mot d’ordre puisque la Katholieke Universiteit Leuven participa à leur organisation en la personne de Maurits Smeyers et de ses assistants. N’assistèrent au premier colloque que treize participants dont les organisateurs ! Mené à partir du document de fondation qu’est la thèse de Johannes Taubert (Zur Kunstwissenschaftlichen Auswertung von naturwissenschaftlichen Gemäldeuntersuchungen, Marburg, 1956, cette thèse fut publiée de façon posthume en 2003)[1], ce premier colloque montra la volonté de mettre en lumière les procédés techniques utilisés dans l’étude du dessin sous-jacent et de s’interroger sur la terminologie à employer dans ce genre d’études (et la traduction en diverses langues des termes techniques). Les actes du premier colloque ne furent publiés qu’avec ceux du deuxième colloque (1977) en 1979 (Van Schoute & Hollanders-Favart 1979). Cette publication montre également l’intérêt qui fut accordé lors du deuxième colloque à la présence de dessins sous-jacents dans d’autres media que la peinture (peinture murale, broderie, miniature). Par la suite, les colloques eurent lieu tous les deux, puis trois ans. En 2024 se déroula la 23e édition de ces rencontres internationales. Réunissant un très grand nombre de chercheurs internationaux, ces colloques furent organisés par R. Van Schoute, en compagnie de son équipe, jusqu’en 2006.
À la fin des années 1980 et dans les années 1990, sous l’impulsion de musées anglo-saxons, une nouvelle tendance vit le jour. Il s’agissait de réaliser des catalogues scientifiques de grandes collections muséales combinant l’histoire de l’art « classique » et l’étude des œuvres par les méthodes scientifiques. Dans cette foulée, R. Van Schoute va être un des instigateurs d’un grand projet de ce type de catalogue scientifique qui sera consacré aux œuvres des Primitifs flamands conservées aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB) à Bruxelles. En effet, en 1993, un projet combiné entre ces Musées (E. De Wilde, conservatrice en chef), la Katholieke Universiteit Leuven (M. Smeyers) et l’Université catholique de Louvain (R. Van Schoute) vit le jour dans le cadre d’un programme nommé « Centres de services et réseaux de recherches » créé et financé par les Services fédéraux des Affaires Scientifiques, techniques et culturelles (SSTC) du gouvernement fédéral belge. Tout le long de ce projet, R. Van Schoute fera partie du conseil scientifique qui le chapeauta. Ce catalogue comprend cinq volumes dont le dernier a été publié en 2009.
En conclusion, R. Van Schoute a été une des chevilles ouvrières de la diffusion des méthodes scientifiques dans l’étude de la peinture, que cela soit en Belgique ou à l’étranger. Dans la lignée d’une grande tradition belge, il s’est surtout concentré sur l’étude de la peinture des Pays-Bas méridionaux aux XVe et XVIe siècles, et en particulier de l’œuvre du Maître de Flémalle, de Rogier van der Weyden, de Dirk Bouts et de Jheronimus Bosch. Ses recherches ont été à la pointe des études techniques et ses collaborations internationales ont été nombreuses. Il en est ressorti des études fondamentales pour la connaissance des Primitifs flamands. Outre des études de cas, il s’est fortement intéressé aux nouveaux procédés techniques, à leur possible usage dans l’examen des peintures, ainsi qu’à la terminologie à employer. Il a également toujours insisté pour partager les connaissances scientifiques dérivées de ses travaux non seulement avec ses étudiants (il donna leur chance à de nombreux jeunes chercheurs), mais également avec le grand public, lors d’expositions.
Anne Dubois
[1] J. Taubert, Zur Kunstwissenschaftlichen Auswertung von naturwissenschaftlichen Gemäldeuntersuchungen, Siegl, Munich, 2003.
Bibliographie de l’auteur
Bibliographie sur l’auteur
Sources d’archives
- Service des Archives de l’Université catholique de Louvain, Louvain-la-Neuve (AUCL, BE A4006)
- Archives de Roger Van Schoute (FI 205)
- Archives du Laboratoire d’étude des œuvres d’art (FI 328)
- Document audiovisuel
- Intervention de Roger Van Schoute dans : L. Ponette (prod.) et J.-L. Loiseau (réal.), Les Mondes rêvés (2/5), Jérôme Bosch (1450-1516), la controverse en peinture [épisode de podcast audio], France culture, 4 août 2020 (extraits de l’émission du 14 septembre 2003). https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/toute-une-vie-40-figures-de-la-culture/jerome-bosch-1450-1516-la-controverse-en-peinture-4218177
Documents iconographiques


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